Ah ! qu’ils sont beaux sur la montagne, les pas de ceux qui portent la Bonne nouvelle » ! N’est-ce pas ce que l’on peut dire aujourd’hui lorsqu’on nous voit sur cette colline de St Denis- visages heureux, pleins d’espérance, regards fraternels, sourire aux lèvres !
Bien-aimés de Dieu, chers tous : Peuple de Dieu de ce diocèse de Seine-Saint Denis et votre Evêque, Mgr Pascal, vous frères et sœurs originaires du Congo et du diocèse d’Owando vivant dans ce diocèse ou simplement en France, je vous salue tous. Je suis dans cette église-cathédrale au milieu de vous et devant vous comme un frère, un vrai frère. Tel est le sentiment qui est le mien. Alors, frères et sœurs bien-aimés de Dieu que la paix et la grâce de Dieu vous soient données en Jésus Christ !
Vous connaissez cette affirmation : « la France est la fille aînée de l’Eglise » Et l’Eglise de France n’a pas 135 ans comme celle du Congo. Pourtant je me sens bien compris chez vous comme par un ami. Et avec vous je suis heureux de me mettre au service de Dieu qui nous a oints et fait de nous ses serviteurs afin de partir et de porter la Bonne Nouvelle. Avec vous, depuis si longtemps chrétiens, j’ai le même souci et ensemble nous pouvons dire : « Owando, Saint Denis, nous avons un même défi : annoncer l’Evangile.
Ils ont été nombreux les missionnaires que la France a envoyés à travers le monde et particulièrement au Congo pour annoncer l’Evangile, annoncer la paix, le salut. Il y en a qui y ont leur tombe. Ces missionnaires grâce à la Parole de Dieu et aux sacrements nous ont arrachés de l’esclavage du péché. Grâce à l’Evangile et aux sacrements, nous sommes devenus comme vous et avec vous Enfants de Dieu. Comme vous et avec vous nous sommes invités à vivre dans la joie, la paix parce que sauvés que nous sommes grâce au Sang versé, grâce à la Croix et à la mort de Jésus Christ.
En prenant notre humanité, Jésus nous a permis d’entendre ce chant des Anges qui nous ont assuré la paix venant de Dieu. Et pourtant, après des centaines d’années dans la foi au Christ Jésus, pouvons-nous en quelque sorte dormir sur nos lauriers, fiers de ce que la foi en Christ Jésus a réalisé dans chacune de nos vies, et dans nos sociétés ?… Notre réponse est assurément non. Aussi, annoncer l’Evangile demeure-t-il encore un défi. Aujourd’hui. En effet, les anciens, ceux qui, dans la foi ont construit de tels édifices, ceux qui ont accepté de mourir pour leur foi comme le Saint Patron de cette église cathédrale, St Denis, peuvent-ils, s’ils revenaient, nous féliciter avec les mots de St Paul :
« Nous rendons grâce à Dieu quand nous faisons mention de vous, nous gardons le souvenir de votre foi active, de votre amour qui se met en peine et de votre persévérante espérance ! »
Oui la Parole de Dieu, l’Evangile garde aujourd’hui encore sa jeunesse, son actualité, au Congo comme ici en France et partout ailleurs. D’ailleurs le monde est désormais comme un gros village : les joies et les peines, les problèmes et défis ne touchent pas seulement une partie de ce village mais tout le «village-monde ».
Oui, frères et sœurs de Saint Denis et vous frères et sœurs d’origine congolaises, aujourd’hui encore, l’Evangile garde sa jeunesse, son actualité. Aussi, Jésus nous commande-t-il : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit » Dieu veut sauver tous les hommes et n’en perdre aucun. Et pour ce salut, les hommes ont besoin d’entendre et d’accueillir l’Evangile de sorte que demain celui qui se perdra, celui qui ira loin de Dieu sera l’homme ou la femme qui, librement aura choisi de se perdre. Ce sera l’homme qui choisira en toute conscience et liberté de ne pas être aux côtés des saints, de ces hommes et ces femmes qui nous ont marqués par leur bonté, leur souci des autres et particulièrement des plus démunis, par leur soif de la justice, par leur lutte pour la justice, leur amour de la paix, leur soif de la fraternité, leur joie à pardonner.
Allez donc, frères et sœurs, je veux m’adresser à vous tous baptisés : allez ! allons donc évangéliser c’est-à-dire, allons annoncer par la parole et par notre vie la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, crucifié, mort et ressuscité, chemin, vérité et vie. Notre témoignage est donc nécessaire, à vous de Saint Denis comme à nous d’Owando au Congo. C’est un même défi qui se présente à nous : celui d’évangéliser où que nous soyons.
Le jumelage est un moment qui nous est donné par l’Esprit Saint ; un moment de grâce pour nous au Congo comme pour vous ici à Saint Denis. Avec la grâce de Dieu nous sommes « instamment invités à avancer en eau profonde et à lâcher les filets pour la pêche (Lc5,4) » Il y a encore tant de choses à faire, tant d’hommes, de femmes, de jeunes, d’enfants auxquels il faut annoncer la Parole de Jésus Christ. Un même défi !
Ici, ma pensée se tourne vers les premiers chrétiens qui ont entendu l’Evangile. Les apôtres leur ont parlé de l’amour, de la fraternité, de la justice. Et les païens qui ont vu vivre ces premiers croyants se sont étonnés disant: « Voyez comme ils s’aiment ». Cet amour-là, existe-t-il encore dans nos communautés chrétiennes… L’Afrique avait dans sa culture la valeur de la solidarité qui grâce à la Parole de Jésus Christ devait gagner en force, comme Jésus nous y invite en St Jean au ch. 17 lorsqu’il dit :
« Ce n’est pas seulement pour eux () que je prie mais encore pour ceux qui croiront en moi par leur parole, afin qu’ils soient un comme toi Père tu es en moi et moi en Toi, afin qu’eux aussi soient un en nous – pour que le monde croie que tu m’as envoyé » 17,20-21
Les croyants que nous sommes, ne faisons-nous pas le même constat que je fais dans mon diocèse et dans l’Eglise qui est au Congo: individualisme, déchirures sociales, injustices, exploitations, tribalisme, racismes, exclusions. Par le baptême pourtant et la foi en Jésus Christ nous sommes bien devenus enfants de Dieu, donc nous formons tous une même famille : celle des enfants de Dieu dans laquelle on trouverait amour, attention aux autres, pardon, solidarité, souci des uns des autres : « Mais à tous ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, Jésus la Véritable Lumière a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jn1,12)
Nous avons donc ici comme là-bas à annoncer Jésus Christ qui est vie, chemin, vérité. Chemin de l’amour vrai, vérité sur ce que nous sommes (noirs, jaunes, blancs). Ce même Jésus nous demande de l’imiter lui qui est doux et humble de cœur. Ce qui nous aurait permis d’affermir la famille des enfants de Dieu que nous formons. Mais, Le constat dans l’Eglise de Jésus qui est au Congo présente encore injustices, violences, haines et conflits. Ces antivaleurs chrétiennes se retrouvent encore aussi dans des pays de vieille chrétienté où l’on voit dans les rues des désespérés, des exclus. Il nous faut donc annoncer, revoir comment annoncer la Parole pour une vie qui prend véritablement racine dans l’Evangile.
Permettez-moi encore une illustration qui nous dit l’urgence et l’actualité de l’annonce de la Parole de Dieu. Ici comme là-bas nous sommes invités à annoncer par la parole certes, mais aussi le témoignage de vie, nous rappelant : que Dieu veut sauver tous les hommes et n’en perdre aucun
En effet, après plus de deux mille ans d’histoire religieuse, l’homme n’a pas encore changé de vie, de comportement par rapport au Créateur. Parfois, à se demander si le monde ne recule pas : Au début de la création de l’homme par exemple, celui-ci a voulu être comme Dieu, prendre la place de Dieu. C’est Le premier péché de l’homme : celui de la désobéissance. Dieu dit : tu ne feras pas ceci ; tu ne prendras pas ce chemin. Adam dit je le fais et je serai l’égal Dieu comme vient de me le suggérer l’ange de lumière (Lucifer) qui avait lui-même déjà désobéi en voulant être comme Dieu. Aujourd’hui, après 2000 ans dans la foi, l’homme fait la même chose qu’Adam : ce que Dieu appelle « abomination » l’homme en fait une valeur. Ce qui rabaisse l’humanité, l’homme d’aujourd’hui l’appelle expression de sa liberté, expression de sa grandeur. Ce que dans nos cultures est considéré comme une maladie, une honte, en d’autres cultures, c’est une preuve de grandeur, de liberté. Le péché d’Adam revient en force dans un monde qui devient si petit… Il est urgent que nous nous laissions envahir par l’Esprit Saint pour que revienne le Messie afin qu’il nous arrache du péché et de l’orgueil…
Les défis sont grands et nombreux. Je m’en voudrais de ne rien dire à propos des jeunes. Quand je les vois sortir des écoles ici et chez nous, je me dis toujours : que vont-ils devenir demain, tous ces jeunes ? Ici encore il y a moyen de faire des choix ! Mais chez nous, quels choix trouve-t-on ? Il y a des jeunes diplômés qui trainent dans les rues ne sachant quoi faire. D’autres ayant perdu tout espoir et toute espérance, dégoûtés de la vie se jettent dans les rues de la ville et avec des armes blanches s’attaquent aux personnes qui passent pour arracher argent, téléphones, bijoux…quel message de Jésus Christ proposer à ces jeunes qui certainement ne croient plus les adultes ni leurs parents ! Ce devra être un message qui donne le goût de vivre sur cette terre, qui donne l’espoir d’une terre meilleure.
Ensemble donc, nous sommes engagés dans une même mission celle d’annoncer Jésus Christ, Dieu qui donne espoir et espérance à tout homme, à toute femme, aux jeunes, aux enfants comme à ceux du troisième âge. Vous et nous pouvons ensemble réfléchir, et voir ce que nous pouvons faire pour une Eglise de Jésus Christ qui accueille, redresse, ressuscite, et met debout, une Eglise qui relève l’homme, tout l’homme.
Ensemble, engagés dans une même mission, avec l’expérience que vous avez- nous n’avons que 135 ans au Congo- et encore ! Avec vous, ensemble nous réfléchirons et travaillerons à faire que l’Evangile ne soit pas une simple parole que l’on peut clamer comme une récitation, mais que les baptisés au Nom de Jésus Christ, animés par l’Esprit vivent de l’Evangile. En d’autres termes, que les baptisés aient des comportements transformés par l’Evangile.
Ensemble, avec vous nous travaillerons dans la vérité de notre foi et de l’Evangile à l’établissement de plus de justice dans nos communautés, dans nos sociétés. En effet comme le Concile Vatican II l’affirmait « les injustices ne sont-elles pas les premières parmi les causes de discorde entre les hommes qui nourrissent les guerres. Nombre de ces injustices proviennent d’excessives inégalités d’ordre économique ainsi que du retard à y apporter les remèdes nécessaires. D’autres naissent de l’esprit de domination, du mépris des personnes, de l’envie, de la méfiance, de l’orgueil et des autres passions égoïstes. » (Gaudium et spes)
Alors seulement, dans le diocèse d’Owando au Congo, on ne parlera plus d’antivaleurs : de ces comportements qui hier étaient bannis mais qui aujourd’hui deviennent comme normaux, justes. Ici on ne parlera plus d’injustices, d’exclusions. Il s’agit de faire prendre conscience à tout chrétien de ce qu’il est : une personne invitée à la sainteté. Une personne capable de voir le bien et rejeter le mal… Ah ! Si on pouvait simplement revenir et essayer de vivre les IO Paroles de Dieu, les IO commandements !
Owando ! Saint Denis, oui ! nous avons le même défi : celui d’annoncer l’Evangile : celui d’annoncer Jésus Christ. Et on ne peut annoncer Jésus Christ sans promouvoir la justice. Et Jésus Christ est le seul qui ouvre la voie à cette libération totale et définitive vers laquelle les hommes aspirent tous au plus profond d’eux-mêmes, sans le savoir. Dès maintenant, frères et sœurs, joyeux dans l’Esprit qui nous anime disons-lui notre fiat et mettons-nous à l’œuvre pour le salut de nos sociétés, pour le salut du monde du monde.